À la rencontre de #16 – Hugues Pagan

Demain, notre vendredi sera dédié aux littératures noires à l’occasion du festival Quais du Polar. À cette occasion, nous avons eu la chance d’interviewer Hugues Pagan dont un des livres vous sera offert par un de nos partenaires.

 

©Hannah Assouline-Opale-Editions Rivages.

 

Hugues Pagan, avec Le carré des indigents, vous revenez à votre protagoniste récurrent, l’inspecteur Claude Schneider. Quelle relation entretenez-vous avec ce personnage ? Est-ce lui qui s’impose dans vos histoires ou vous qui ressentez le besoin de le faire exister ?

Schneider est une vieille histoire et le premier personnage qui ait hanté mon premier roman, La mort dans une voiture solitaire, en 1982. Dans mon esprit, ce livre au destin improbable devait rester sans suite et puis la vie en a décidé autrement. J’ai parlé de hantise : Schneider s’est imposé comme un fantôme à la fois tenace et sarcastique, aux mobiles passablement impénétrables et au destin passablement tragique. Je voudrais bien prétendre l’inverse et me poser en Dieu, mais hélas je dois convenir que Schneider s’impose à moi bien plus que je ne m’impose à lui. Dans l’ensemble, nos relations sont empreintes d’une cordialité distante et, je crois, d’une certaine estime que je souhaite mutuelle.

 

En 2018, vous avez publié Mauvaises nouvelles du front, un recueil de nouvelles. Comment passez-vous du format long du roman au format condensé de la nouvelle ?

Une nouvelle, c’est du tir au stand à vingt-cinq mètres en tir tendu, avec un pistolet à un coup. Tout en réflexion, en précision, en vigilance. La cible n’est pas loin, elle doit être clairement identifiée et accessible. La limite inférieure tend vers la pure poésie en quelques lignes (« As swallow they came / As swallow they went »), la limite supérieure est le roman réussi. il en existe : Typhon de Conrad, par exemple.

J’avoue que le choix est souvent dicté par le pur et simple caprice, même si le véhicule choisi (roman ou nouvelle) tient aussi du fond que l’on veut évoquer. Toute une vie en une brève nouvelle me parait tout indiquée pour retracer l’existence d’un homme seul sur une île déserte, durant les quelques instants quechua pendant lesquels, tout en contemplant l’horizon plat du vaste océan vide, il décide de mettre fin à ses jours – par noyade, par exemple.

 

Vous écrivez également des scénarios, notamment pour la série Mafiosa ou l’adaptation télévisée des romans de Jean-François Parot mettant en scène le commissaire Nicolas Le Floch. Après 23 ans à travailler dans la police, quelle expérience personnelle injectez-vous dans ce travail de fiction ?

 La notion d’injection me laisse pensif et désemparé. Elle implique un appareil, un mode de fonctionnement qui a fait ses preuves dans le domaine des moteurs d’avion et de voiture dès le début du dernier siècle. il a fallu y adjoindre ensuite le compresseur, puis le turbo-compresseur. Rien à voir avec le « travail de fiction », qui, pour moi s’apparente plus à la cuisine ou à l’alchimie qu’à la mécanique. Il s’agit d’une promenade dans l’imaginaire (plus ou moins riche) de l’auteur, la fiction n’entretenant avec la «réalité » qu’un rapport de pure complaisance. moins l’imaginaire est riche et puissant, moins le héros est héroïque, moins le personnage offre d’intérêt, ce qui vaut aussi pour l’anti-héroïsme, plus l’auteur se voit contraint d’injecter une dose de documentaire, voire d’expérience personnelle dans leurs produits, au demeurant parfaitement calibrés et parfois lisibles, au moins d’un index distrait.

D’où la profusion d’ouvrages très documentés, sinon purement documentaires et biographies (plus ou moins déguisés et hagiographiques) de soi. Pour moi, la réponse est simple : le moins possible. Tout juste ce qui peut enrichir la trame et les personnages d’un roman, en évitant de confondre pistolet et revolver, levée d’écrou et libération conditionnelle, tout ce que l’on pourrait trouver en somme pas un bouquin qui pourrait s’appeler « La police pour les nuls » !

 

Nous invitons chaque semaine les internautes à partager leur #MardiConseil. Quel est le meilleur conseil de lecture que vous avez reçu et/ou donné ?

SI VOUS N’ÊTES PAS CONTENT, ÉCRIVEZ ! (L’administration)


Chaque début de semaine, nous posons #LaPetiteQuestionDuLundi à nos participants. La plus fameuse d’entre elles est la suivante : Avec quel personnage de la littérature voudriez-vous être coincée dans un ascenseur ? Et pourquoi ?

 Je déteste les ascenseurs.

 

Un grand merci à Hugues Pagan pour le temps qu’il nous a conscré !